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Avec l'Iran, Trump fait le pari le plus risqué de sa présidence
information fournie par Reuters 25/06/2025 à 12:23

par James Oliphant

Le président américain Donald Trump, en ordonnant des frappes dans la guerre contre l'Iran et en faisant pression pour un cessez-le-feu entre Israël et la République islamique, a probablement fait son pari politique le plus risqué depuis son retour à la Maison blanche, en janvier.

Si les gains sont potentiellement élevés et dépendent en grande partie de la capacité de Donald Trump à maintenir la trêve fragile qu'il tente d'instaurer entre l'Iran et Israël, les experts estiment que les événements pourraient lui échapper sous le regard sceptique de l'opinion publique américaine, en particulier de sa base électorale.

Pour l'instant, la chance semble sourire à l'ex-propriétaire de casinos. "Il a parié", estime Firas Maksad, directeur pour le Moyen Orient et l'Afrique du Nord chez Eurasia Group. "Les choses sont allées dans son sens."

Mais si les hostilités venaient à reprendre entre Israël et l'Iran, ou si Téhéran ripostait militairement ou économiquement, Donald Trump risquerait de voir se fragmenter la coalition "America First" qui l'a aidé à revenir au pouvoir, en faisant de son mouvement un objet de plus en plus nébuleux et mal défini.

"Si dans six mois l'Iran continue d'être un problème, la coalition MAGA [Make America Great Again] s'en trouvera affaiblie", juge Chris Stirewalt, analyste politique à l'American Enterprise Institute, un cercle de réflexion conservateur.

D'une certaine manière, ajoute Chris Stirewalt, Donald Trump a d'ores et déjà terni la "marque" MAGA en trahissant sa promesse de campagne de ne pas impliquer les États-Unis dans un autre conflit au Moyen-Orient.

"LIGNE DE FRACTURE"

Cette décision risque de poser problème à tout candidat républicain qui se réclamerait de son héritage lors de la prochaine présidentielle.

"En 2028, la question de l'intervention militaire à l'étranger sera une ligne de fracture. Ce sera un test décisif, alors que chacun cherchera à définir ce que signifie réellement MAGA", selon Chris Stirewalt.

La Maison blanche a notamment laissé au vice-président J.D. Vance, l'un des membres les plus isolationnistes de l'administration, le soin de défendre l'attaque contre l'Iran. Considéré comme l'un des héritiers du mouvement MAGA lorsque Donald Trump quittera la scène, J.D. Vance devra le cas échéant concilier ce soutien avec sa propre opinion.

L'Iran n'est pas le seul exemple où Donald Trump a misé gros et où l'issue de son pari est plus qu'incertaine.

Son recours erratique à l'arme des droits de douane a suscité l'incertitude sur les marchés et alimenté les craintes d'inflation, son projet de sabrer dans les effectifs de la fonction publique, porté par Elon Musk, a donné des résultats plus que mitigés et sa ligne dure en matière d'immigration a déclenché des manifestations dans tout le pays.

UNE POLITIQUE ÉTRANGÈRE MAL PERÇUE

Si Donald Trump contraignait Téhéran à renoncer pour de bon à ses ambitions nucléaires, il s'agirait d'un succès majeur qui lui permettrait d'asseoir son héritage dans une région où les présidents américains ont essuyé des revers pendant des décennies, notamment en Irak et en Afghanistan.

Donald Trump a fait campagne sur la fin des "guerres éternelles", ce qui explique en partie l'inquiétude de l'opinion publique américaine à l'égard du dossier iranien.

Selon un sondage Reuters/Ipsos publié lundi et réalisé avant l'annonce du cessez-le-feu, seulement 36% des personnes interrogées soutenaient les frappes contre le programme nucléaire iranien.

Dans l'ensemble, l'approbation de Donald Trump est tombée à 41% - un nouveau plus bas pour son deuxième mandat - et sa politique étrangère est encore plus mal perçue.

Selon Dave Hopkins, expert en politique américaine au Boston College, le président a négligé d'expliquer à l'avance au peuple américain que la frappe contre l'Iran était dans l'intérêt des États-Unis.

"Nous n'avons pas vu de discussion sur l'Iran en tant qu'ennemi majeur des États-Unis ou en tant que menace pour les États-Unis", souligne Dave Hopkins.

La Maison blanche a cependant défendu les décisions de Donald Trump en les qualifiant de vitales et fructueuses.

"En seulement 48 heures, le Président Trump a accompli ce dont ses prédécesseurs ne pouvaient que rêver : les capacités nucléaires de l'Iran ont été anéanties (...), un cessez-le-feu a été conclu pour mettre fin à la 'Guerre de 12 jours' et le monde entier est plus en sécurité", a déclaré Anna Kelly, porte-parole de la Maison Blanche.

"Les Américains peuvent dormir sur leurs deux oreilles en sachant que notre nation est en sécurité parce que le président Trump est aux commandes."

TRUMP A SUIVI ISRAËL, ET NON L'INVERSE

Dave Hopkins rappelle cependant que le président américain, contrairement à ce qu'il affirmait pendant sa campagne, en promettant de mettre fin aux guerres en Ukraine et à Gaza, s'est rendu compte qu'il ne pouvait pas plier Moscou et Jérusalem à sa volonté. En frappant l'Iran, il a ainsi suivi les pas d'Israël, et non l'inverse.

Sa décision de bombarder l'Iran illustre aussi la manière dont il a abordé son second mandat, gouvernant sans nécessairement se soucier de l'opinion publique ou du Congrès.

Selon Allison Stanger, politologue au Middlebury College, la retour de bâton ne sera peut-être pas immédiat, mais il pourrait prendre la forme d'une poursuite des mouvements de contestation ou d'une progression des démocrates lors des élections de mi-mandat, l'année prochaine.

"Le risque politique de M. Trump ne réside pas dans une escalade immédiate", juge-t-elle. "C'est plutôt la rancœur diffuse qu'il a alimentée sur plusieurs fronts, tant à l'étranger qu'au niveau national."

(Reportage James Oliphant, version française Benjamin Mallet)

1 commentaire

  • 25 juin 12:44

    Les Midterms 2026 seront fatales pour les MAGA……


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